Cryptomeria japonica, cèdre sacré du Japon
Au Japon, le Cryptomeria est un arbre sacré qui, dans sa version XXL, couvre les temples de sa ramure légère. Dans nos jardins, le Cryptomeria du Japon existe sous des formes et des tailles très variées. Ce conifère très original est à découvrir autant pour orner le jardin que les balcons. On peut même le mener en bonsaï.
Forêt de Cryptomeria dans la forêt de Nikko Tosho-gu au Japon
1 - Un conifère d’une grande élégance
S’il atteint 45 mètres de hauteur dans son pays d’origine, le cryptomère ne dépasse guère 25 m chez nous, et bien moins pour certains de ses cultivars qui sont quasiment nains ! Cet arbre appartient à la famille des Taxodiacées comme le cyprès chauve ou notre if européen.
L’arbre, au tronc bien droit, se caractérise par un feuillage fait d’aiguilles courtes imbriquées et recourbées vers l’intérieur. Comme bien d’autres conifères sa floraison est très discrète au point de lui donner son nom qui vient du terme grec « meris » qui signifie « partie » et « kryptos » qui signifie « cachée ».
photo ci-contre de Cryptomeria au Parc de la Pépinière à Nancy
Cônes de Cryptomeria à l'Arboretum des Barres à Nogent-sur-Vernisson (45)
(Photo Vavou)
Inutile de s’inquiéter si des rameaux brunissent çà et là, c’est sa manière de renouveler le feuillage. Cela s’appelle le phénomène de décurtation. Ses rameaux se renouvellent au bout de 4 ou 5 ans. Ce conifère bien que persistant prend des teintes de couleur rouille avec le froid. Chez les cultivars, ce phénomène est encore plus marqué car le feuillage demeure doux au toucher dans son état juvénile.
Son écorce est aussi très intéressante car elle prend une teinte grise et cuivrée en même temps. Elle est très filandreuse, épaisse et spongieuse, un peu comme chez les séquoias.
Cryptomeria à l'Arboretum des Barres à Nogent-sur-Vernisson (45)
(Photo Vavou)
2 - Un arbre sacré au Japon
Cryptomeria du temple de Nikko-Tosho-gu (photo krapooarboricole)
Bien avant d’être décrit par le botaniste anglais Don en 1839 et introduit en France en 1842, le cryptomeria était et demeure un arbre sacré au Japon. Appelé « Cèdre du Japon », « Sugi » en japonais ou « Liu shan » en chinois, sa silhouette conique orne l’entrée des temples et des oratoires avec majesté. Le botaniste anglais Sargent qui a écrit une impressionnante flore forestière du Japon en 1894 rapportait une anecdote particulièrement intéressante sur l’importance accordée à cet arbre :
En 1616, un daimyo, un seigneur féodal japonais, était trop pauvre pour offrir une lanterne en pierre à la mort de son Shogun dont les funérailles avaient lieu à Nikko Tosho-gu. Au lieu d’une lanterne, il proposa de planter une avenue de cryptomeria afin de protéger les futurs pèlerins de l’ardeur du soleil lorsque ceux-ci se rendraient sur la tombe du Shogun. Les autorités officielles acceptèrent son offre et l’avenue de cryptomères fut plantée aussitôt. Le daimyo ne s’était pas moqué de son seigneur car cette allée faisait 65 kilomètres de long et elle existait toujours du temps de Sargent.
(Allée de Cryptomeria à Nikko-Tosho-gu (photo krapooarboricole)
Cette histoire comme d’autres nous interroge sur l’espérance de vie des cryptomérias. Selon Suzuki et Tsukahara (1987) une section de tronc de cryptomère présentant plus de 1700 cernes annuels trônerait dans un bureau forestier de Shimoyaku. Mais quel est le cryptomère le plus vieux et toujours vivant ? Il semblerait que les plus vieux exemplaires vivants de cryptomères se trouvent dans le parc national de la forêt de l’île de Yakushima. Ces arbres très rares puisqu’il n’y en a pas plus d’un par hectare auraient près de 700 ans. Quand ces arbres dépassent les mille ans, ils sont appelés Ko-sugi, tandis que les Yaku-sugi auraient, eux, plus de trois mille ans.
Les vieux cryptomeria de l’île de Yakushima : un exemplaire photographié par Wilson en 1916
Et, parmi eux, à 1350 mètres d’altitude, se trouve le vénérable « Jomon Sugi » qui, lui, serait multimillénaire. Et, je n’ose pas vous dire combien exactement car il y a quand même quelques sérieux doute sur les chiffres avancés. Toujours est-il qu'il est très vieux, très vénérable et que s’il n’est pas très grand (25 m), il fait malgré tout 16 m de circonférence !
Le vétéran actuel de l’île de Yakushima : le « Jomon Sugi »
3 - Des cultivars pour tous les goûts et tous les usages !
Pousses en crêtes de coq de Cryptomeria japonica ‘Cristata’ (Photo Vavou)
Le cryptomeria trouve naturellement sa place dans les jardins japonais de style zen ou feng-shui. Qui plus est, vu la diversité de ses cultivars, il peut créer des ambiances très différentes.
Pour les petits jardins, il existe une cinquantaine de cultivars « nains ». Ils ont une forme plus ou moins globuleuse avec un feuillage plumeux plutôt excentrique chez ‘Cristata’. Les extrémités de ses rameaux fusionnent donnant l’apparence de crêtes de coq. De croissance lente, ce cultivar introduit du Japon en Europe en 1901 mesure entre 3 à 5 mètres de haut pour 2,5 mètres de large.
La forme sans doute la plus populaire des Cryptomeria est C. j. ‘Elegans’. Ramené par Thomas Lobb en 1854, ses pousses souples, à l’aspect mousseux et d’un beau coloris vert bleuté au printemps, virent dans des tons cuivrés ou bronze en hiver. Il mesure environ 5 m à l’âge adulte. Chez ‘Elegans Viridis’ la végétation reste verte toute l’année ainsi que chez ‘Jindai-Suji’ de taille plus réduite (2-3 m).
Changements de couleurs du Cryptomeria japonica en été et en hiver
Pour les rocailles, choisissez des formes compactes, sphériques comme C. j. ‘Vilmoriniana’, limitée à 60 cm de haut. Ses jeunes pousses vert tendre au printemps deviennent rougeâtres avec le froid. Le Cryptomeria japonica ‘Globosa Nana’ souvent présenté comme nain peut atteindre malgré tout une taille honorable de 3 m de diamètre en l’espace de 15 ans !
Feuillage rougi du Cryptomeria japonica 'Vilmoriniana' en hiver (Photo Vavou)
4 - Ses exigences culturales
Dans son milieu naturel (photo ci-contre), le cryptomeria pousse entre 400 et 2000 mètres d’altitude, notamment dans le centre ouest du Japon où il est bien arrosé puisqu’il tombe entre 1500 et 2000 mm de pluie par an (par comparaison, il tombe 1000 mm à Besançon, 900 à Bordeaux et 650 mm à Paris et 550 mm à Marseille). Si les températures ne dépassent jamais 30°C dans cette partie du Japon, elles ne descendent guère en dessous de zéro degré. Pourtant, chez nous le Cryptomeria peut résister à des hivers froids et des températures inférieures à moins - 15°C. Il se plaît donc particulièrement bien sous le climat océanique de la façade atlantique.
Allée de Cryptomeria à la villa Arnaga à Cambo-les-Bains (64) (Photo Vavou)
Les branches assez épaisses redoutent le poids de la neige. Il apprécie les régions au climat humide comme la Bretagne, le Limousin, les Pyrénées-atlantiques. Le manque d’eau provoque le dénuement rapide des rameaux qui se dégarnissent alors de la base. Plantez-le dans un sol frais et bien drainé sans excès de calcaire, au soleil ou à mi-ombre. Il pousse rapidement même dans des sols acides et très pauvres chimiquement pourvu qu’il y ait des pluies régulières. Il est également très résistant à la pollution.
Un bois d’œuvre de qualité
Originaire de l’île de Honshu au Japon, le Cryptomeria forme des forêts denses entre 200 et 2000 m d’altitude. Il existe cependant une variété chinoise (var. sinensis) au port plus souple et aux rameaux moins épais. Le Cryptomeria est réputé pour son bois d’œuvre brun à légèrement rosé, de qualité homogène, dur et facile à travailler et odorant (d’où le nom de cèdre). Au Japon, on s’en sert comme bois de charpente, de bardage et de lambris. On en tire aussi une huile essentielle aux propriétés antiseptiques, expectorantes, diurétiques et vermifuges. Sa culture sous forme de plantation forestière est pratiquée en altitude sur l’île de la Réunion mais aussi dans le centre ouest de la Bretagne où sa ramure souple résiste plutôt bien au vent. Dans les autres régions françaises, on l’utilise comme arbre d’ornement où sa taille ne dépasse guère 25 m de haut.
5 - Pour en savoir plus et articles de saison
En fouillant bien sur le site suivant (http://krapooarboricole.wordpress.com/bienvenue-dans-la-foret/), vous trouverez de belles photos de Cryptomeria dans leur forêt d’origine au Japon.
Je vous invite aussi à lire mes articles dans la catégorie « Arbres (conifères) » sur le Metasequoia de Chine et l’Araucaria du Chili. Et comme nous avançons à grand pas vers l’automne, vous pouvez lire l’article sur les arbres aux couleurs automnales ainsi que sur les Camellia sasanqua et n’oubliez pas de préparer vos plantations de tulipes dès maintenant pour une floraison au printemps prochain !